Il y a des dynasties, chez les Custodes. Des familles entières dédiées au Conseil. Et la famille de Pechkin a de longues années régné sur Tromsø avec la sévérité que l’on attend de Rusalki russes et sévères. Père et Mère étaient des agents fanatiques, dépendant financièrement de l’Ordre pour leur survie tant ils dévouaient leur temps à surveiller et contrôler la population monstrueuse et humaine de la ville. C’est donc dans un appartement quasi militaire qu’Ikolve a vécu son enfance. Une étrange frugalité a rythmé une longue partie de sa vie, guidé par des parents aux attentes nombreuses et grandissantes. Ikolve sera Custos, comme son père, comme sa mère. Encore plus qu’eux. C’est ainsi qu’il les vengera, c’est ainsi qu’il protègera les monstres des humains et c’est ainsi qu’il canalisera ce besoin de violence qui grogne dans son ventre.
Un jour, cependant, à ses dix ans, l’entraînement offert par ses parents prendra fin. L’apprenti Custos ne les verra jamais revenir de cette mission sur les traces du nouveau monstre anti-Conseil, surnommé le Croisé des Gardiens. Celui qui se glisse chez des Custodes, les torture après leur avoir coupé la langue, avant de récupérer le nom des suivants, et de finir le travail. Et on recommence. Une technique qui l’a mené jusqu’aux parents du petit Ikolve. Des parents qui l’ont mené jusqu’au petit Ikolve lui-même. Qui n’avait pas ouvert la fenêtre, et qui n’a pas compris qu’elle s’ouvre sur l’homme en noir à la voix douce. À qui on a pas expliqué qui était et ce que faisait le Croisé des Gardiens, et qui a dû le découvrir par lui-même.

On ignore pourquoi l’enfant a eu la vie sauve. Sûrement parce qu’il n’était qu’un apprenti, et pas un Custos officiel. Peut-être par compassion. L’enfant n’a pas pu le dire. En vérité, l’enfant ne peut plus rien dire maintenant que sa bouche est vidée de sa langue. On lui trouve une autre famille, des Satyres de l’Ordre, qui n’arriveront jamais à véritablement intégrer l’enfant à leur cercle.
Et pendant que l’enfant continue de grandir, le Croisé des Gardiens continue d’agir, aux quatre coins du globe, sans pouvoir être traqué. Bien que l’on s’y essaye et que, très vite, le jeune homme dévoue à son tour son temps au Conseil, au Croisé et, surtout, à sa vengeance. Se refusant toute fioriture, tout caprice, tout attachement qui risquerait d’arrêter son cœur à jamais.

Jusqu’à ce qu’il remonte la trace du Croisé jusqu’au Japon, et qu’il parte seul pour mettre fin à sa folie. Il avait prévu de prendre la vie du Croisé mais y perdra la sienne en tenant de sauver Rin Kagewari. Ce sacrifice produira une telle reconnaissance que, aujourd'hui encore, Rin essaye de perpétuer l'héritage de son sauveur et, surtout, de le venger.